1302 – Les éperons d’or

Le beffroi de Bruges


Toute l’Europe a entendu parler de « la bataille des Éperons d’Or ».
Tout commence par « les Matines Brugeoises », aux premières heures du matin de ce 17 mai 1302, au moment où les moines chantent l’office des Matines alors que la fière cité de Bruges était encore plongée dans la nuit. Le roi Philippe le Bel était il y a quelque temps venu sceller son alliance avec les « Leliaerts », les partisans du Lys, partisans d’une Flandre plus proche de la France que de l’Angleterre. C’était sans compter avec le petit peuple et la bourgeoisie, ceux qu’on appelait les « Klauwaerts » (allusion aux griffes du Lion de Flandre) et qui voulaient qu’on respecte l’indépendance du gouvernement de la Flandre qui avait été accordée en 1256 par le roi Louis XI par l’« édit de Péronne ». Ces Flamands avaient choisi le camp des Anglais avec qui ils faisaient un commerce florissant.
La guerre avec l’Angleterre, la tentative de blocus maritime et l’abcès de fixation en Flandre où les services français d’occupation exaspéraient la population aboutirent à la « Bataille des Éperons d’Or » le 11 juillet 1302 dans la plaine de Courtrai.

La bataille des éperons d’or

Les « Matines Brugeoises » sont le signal. Elles débutent dans la nuit : le mot de passe était « Schild en vriend » – Bouclier et ami. Celui qui ne les prononçait pas correctement fut massacré sur le champ.
L’armée française, en garnison à Bruges, fut ainsi massacrée en plein sommeil. On parle de 1.500 morts et de 100 prisonniers. Le gouverneur Jacques de Châtillon eut tout juste le temps de s’enfuir derrière les murailles de la ville de Courtrai où s’étaient regroupées les troupes de Guy de Namur, fils du Comte de Flandre.
Quand Philippe le Bel apprend le massacre, il lève aussitôt son armée recrutée en Artois, en Normandie, en Picardie et en Flandre (les Leliaerts) et, avec les chevaliers Français, il engage la bataille le 8 juillet 1302 vers midi. La cavalerie française, sous le commandement de Robert d’Artois et Jacques de Châtillon, se trouva au centre du combat, essayant de rompre le front flamand protégé de planyons à picots (sortes de piques terminées par une pointe de fer). Les flèches flamandes « obscurcissaient le ciel » frappant les chevaux et les cavaliers Français qui tombaient emmêlés dans la boue de ces terrains marécageux, coupés de ruisseaux et de fossés.

Philippe le Bel

Les Flamands avançaient au cri de : « Tuez tout ce qui porte éperons ! ». Robert d’Artois et Jacques de Châtillon y sont touchés à mort ainsi que 68 princes et seigneurs : parmi eux le Seigneur de Précy qui fut tué d’un coup d’épée pendant que son cheval s’enfonçait dans le marais. A lui comme aux 1.100 chevaliers, on enleva les éperons d’or. On en trouva 700 qui furent suspendus tels des trophées, à la voûte de l’église Notre-Dame de Courtrai.
Un an plus tard, Philippe le Bel prit sa revanche et essaya de régler ses comptes avec les Flamands à Mons-en-Pévèle.
Il les surprit avec mille hommes mais c’était une bataille sans vrai vainqueur où les Flamands perdirent leur chef.
Le traité d’Athis-sur-Orge obligea Lille, Douai, Ypres, Gand et Bruges d’abattre leurs murs de défense.
Lille, Douai et Béthune, Cassel et Courtrai restaient entre les mains du roi de France.
C’est ainsi que la Flandre, l’Artois et la Picardie seront encore longtemps « Terres de débats », partagés, divisés, rançonnés par les voisins du sud, du nord, de l’ouest ou de l’est ; toujours par intérêt politique ou commercial, ou par jalousie.