LA COMPAGNIE D’ARC

Triptyque de St Sébastien


L’arc et les flèches sont les armes de l’homme primitif. A l’origine, les archers sont des gens d’armes. A l’époque féodale, ces combattants à cheval sont principalement au service des nobles et des seigneurs. A l’époque de Saint Louis, roi de France (1226-1270), ils constituent un Ordre qui est chargé de la défense des Lieux-Saints. Avec l’arrivée des armes à feu tout va changer. Les archers créent des Confréries, sous le patronage de saint Sébastien, et deviennent de plus en plus des jeux d’Arc.

St Sébastien

Saint Sébastien est une des figures les plus représentées dans l’iconographie chrétienne. Son prénom d’origine grecque signifie « sainteté ». Il est représenté dans la force de l’âge, nu, lié par des cordes à une colonne et bardé de flèches, paisible et fort dans sa position d’extrême faiblesse. Il fait penser au Christ. Comme lui il est lié par des cordes, attaché à une colonne pour être martyrisé. Comme le Christ, il n’a qu’un linge attaché autour de sa taille. Les flèches qui le trouent de part en part accentuent sa ressemblance avec l’antique Dieu soleil dont les rayons partent vers les humains. Elles évoquent aussi les traits de Cupidon, le Dieu d’Amour. Sébastien meurt d’amour pour le Christ et ses frères. Il réalise la parole du Christ, qui dit : « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime ».
La colonne d’arbre évoque à la fois l’arbre de vie de la Genèse, la colonne de flagellation de la Passion du Christ, la Croix et l’Église. C’est en effet au moment où la mégalomanie et la dictature policière de l’empereur Dioclétien lézardent l’empire romain, que se déclenche la persécution contre les chrétiens. Saint Sébastien est représenté comme véritable soutien, colonne de l’Église, porteuse d’une civilisation d’Amour alors que la société romaine, hédoniste et matérialiste tombe en ruines.
A l’époque moderne où nous vivons, les confréries de Saint-Sébastien ont pratiquement perdu leur spécificité chrétienne. De ce fait elles s’appellent maintenant « Compagnie d’Arc » et accueillent sans distinction de race, de classe ou de religion tous ceux et celles qui veulent partager ce « noble jeu d’arc ».
Les chevaliers d’aujourd’hui sont également des hommes et des femmes à qui on attribue ce titre honorifique à cause de leurs mérites sociaux, militaires, littéraires, artistiques, sportifs, religieux, etc. comme les Chevaliers de la Légion d’honneur, les Chevaliers de l’Ordre des Arts et des Lettres.

Création de la compagnie d’Arc

Le jeu d’Arc de Précy et la Confrérie de Saint-Sébastien ont été créés à Précy le 27 février 1754 par décret de Monseigneur de POMPONNE « grand maître et juge souverain des jeux d’Arc et par lettres patentes de Dom Louis Joseph DUMESNIL, grand prieur de l’Abbaye Saint-Médard de Soissons, suivant les ordonnances données par le roi saint Louis. Un placet signé de la main du Duc de Montmorency autorise l’établissement du jeu d’Arc ».

Note
Les archives paroissiales de Précy contiennent un manuscrit relatant « l’ordonnance des compagnons du noble jeu de l’arbaleste » qui sont les « Anciens statuts du jeu de l’arbaleste » en vigueur à Paris. « Les arbalétriers de Paris ont été institués par lettres patentes du 9 août 1359 ».
Une lettre datée de Paris le 12 septembre 1607 donne confirmation « de par le roy » pour la confirmation des privilèges accordés aux arbalétriers de la ville de Reims. Ces mêmes statuts sont appliqués par les arbalétriers de Précy.

Histoire de la Compagnie d’Arc de Précy

La Compagnie d’Arc de Précy-sur-Oise a été fondée en 1754, le huit du mois d’avril, par décision de Mgr de Pomponne, Grand Maître et Juge Souverain des Jeux de l’Arc, et par patentes de Dom Louis-Joseph DUMESNIL, Grand Prieur de l’Abbaye Saint-Médard de Soissons, suivant les ordonnances tirées du Grand Tableau en l’Eglise Saint-Médard de Soissons, ordonnées par le Bienheureux Saint Louis, Roy de France. Un placet signé de Mgr le duc de Montmorency-Luxembourg, Pair de France, Seigneur de Précy, autorise en cette même année l’établissement du Jeu de l’Arc dans sa paroisse. En 1776, le baron Toussinet, Colonel des Archers de Paris, prend par un acte sous sa protection la Compagnie de Précy-sur-Oise.

Exposition universelle de 1889

La Compagnie conserve précieusement ses reliques dont le Capitaine a la garde et qu’il détient de ses prédécesseurs.
Parmi elles, la plus importante est le Livre des Délibérations. Ce livre date de 1754. Il renferme l’autorisation de création du Jeu d’Arc avec la signature du Greffier et le sceau de la Compagnie Colonelle de Soissons, la signature et le sceau du baron Toussinet, le sceau des Montmorency-Luxembourg, seigneurs de Précy et protecteurs de sa Compagnie d’Arc.
Toutes les décisions, admissions de Chevaliers, nominations d’Officiers, fêtes traditionnelles, parties de Deuil au décès des Archers y sont fidèlement mentionnés depuis plus de deux siècles.

Bouquet provincial de 1913

C’est l’âme de la Compagnie et le lien entre les générations de Chevaliers.
La Compagnie conserve toujours le placet signé de la main de Mgr le duc de Montmorency-Luxembourg, les Ordonnances du Noble Jeu de l’Arc données en 1754 à la Compagnie par décision de Mgr de Pomponne, une carte offerte en 1756 par le Prince de Condé, la vieille et naïve statue de saint Sébastien, une carte de 1756 d’une partie amicale avec la Compagnie de Villers-sous-Saint-Leu, la carte de la partie de Deuil de Napoléon 1er, Connétable de toutes les Compagnies d’Arc de France. (Ci-joint un fac-similé du placet de fondation de la Compagnie d’Arc).
Aux expositions de Paris de 1889 et 1930, la Compagnie de Précy qui exposait ces souvenirs a remporté les médailles d’argent.
La guerre de 1870 avait mis une première fois la Compagnie en péril : elle fut sauvée par les soins du Capitaine Grégoire Dambreville, mon arrière-grand-père.

Bouquet provincial de 1913

La guerre de 1914-1918 laissa le jeu saccagé et la vieille statue de saint Sébastien profanée et mutilée. Le Capitaine Paul Bachevillier regroupa les bonnes volontés et les Archers s’unirent pour redonner un nouvel élan à la Compagnie.
La guerre de 1939-1945 encore une fois fut néfaste au Jeu et à la Compagnie. A la libération, ce fut notre regretté Capitaine Gaston Vincent qui entreprit la tâche de refaire le groupe et de soigner les blessures dont la tourmente avait marqué le Jeu.
La Compagnie d’Arc de Précy a organisé les Bouquets Provinciaux de 1895, 1913 et 1958 ; les Fêtes de Famille de l’Oise 1927 et 1950 ; 2 concours fédéraux et plus de 30 concours nationaux de Field-Archery entre 1965 et 1975.
La Compagnie est fière d’avoir compté parmi ses membres le Chevalier Brulé (grand-père de MM. Henri et Robert Lauer), champion aux Jeux Olympiques d’Anvers 1920, champion de France 1914, 1921, 1924, et maintes fois champion de Ronde et vainqueur de Bouquets Provinciaux. Sa famille détient un grand nombre de vases de Sèvres, offerts par le Président de la République, souvenirs de ses exploits.

Bouquet provincial du 11 mai 1958

Son vieil ami, le Lieutenant Charles Hachez, 8 fois Roy de la Compagnie de Précy, qui tirait encore à l’arc avec aisance à 80 ans, et dont la silhouette légendaire était connue de tous les archers de l’lle-de-France, de la Picardie et du Valois, accomplit avec lui d’énormes randonnées à bicyclette, pour se rendre dans tous les jeux d’Arc accessibles à leurs moyens et où ils firent des ravages dont tous les Anciens qui subsistent nous parlent encore à la faveur de nos déplacements actuels.
Hector Benaut (grand-oncle de Mme Lampin), fut champion de France jeunesse en 1913 ; Claude Poiret fut 2e au championnat de France jeunesse en 1948 ; Gilbert Marais fut champion de France jeunesse en 1952 et 1953.
Si la Compagnie d’Arc de Précy est tributaire d’un long passé historique et de toutes les traditions que cela comporte, qu’elle se doit de conserver et de préserver, et que les jeunes respectent, elle a su très tôt évoluer vers le sport moderne de l’Archerie. Le poète a dit : le Tir à l’Arc, c’est de la littérature en mouvement…
Actuellement c’est Jacques Demay, dit « Jacky », qui a pris la relève de ses prédécesseurs. Ayant montré dès l’âge de 9 ans des dispositions particulières pour le tir à l’arc (1er du championnat de France Minime à Noyon en 1959), son stage de 16 mois à l’I.N.S. au cours de son service militaire en 1969-1970, puis les stages techniques accomplis depuis, ont développé à tel point ses qualités de tireur qu’il est actuellement classé dans « l’Elite » de l’Archerie Française.

Concours de tir à l’arc

Jacques évolue avec aisance dans les différentes disciplines du Tir à l’Arc : Field-Archery, Tir en Salle, Tir FITA olympique, Tir classique sur cibles ou au Boursault.
Jacques possède à son actif 4 sélections en équipe de France : championnat d’Europe Field-Archery à Ramstein (Allemagne) en 1965, où il remporte le titre de champion d’Europe Junior ; championnat du Monde de Field-Archery à Philadelphie (U.S.A.) en 1969, perdu parmi les 250 meilleurs archers du monde, 20e seniors ; championnat du monde de Field-Archery à Rhonda (Pays de Galles) en 1971, 16e, 11e championnat d’Europe, coupe européenne de Field-Archery à Bad-Goïsern. (Autriche) en 1972, où son tir impeccable décida de la victoire de l’équipe de France et ce fut son plus beau souvenir.
Jacques fut champion de France Junior de Field-Archery en 1946, 2e au championnat de France cibles à Soissons, 2e au championnat de France Boursault à Noyon, 2e au challenge de l’Archer complet à Compiègne, a gagné maints concours fédéraux, s’est toujours classé en tête dans les Bouquets Provinciaux auxquels il a participé jusqu’alors, ne compte plus ses titres de champion de Ronde. Ce dernier été il a accompli une performance remarquable à Antibes, à 4 points du record de France, qui a permis à l’équipe de Picardie de remporter la Coupe de France. Il est actuellement en pleine forme.
Si chaque époque voit un seul jeune faire briller les couleurs de Précy, ce n’est pas suffisant. Malheureusement la Compagnie manque d’éléments qui pourraient seconder une vedette et pourquoi pas faire de même ! … C’est pourquoi je serais très heureux si des jeunes gens de 20 à 30 ans étaient attirés par notre sport, et tentés comme Jacques d’accomplir les mêmes inoubliables voyages, dans l’ambiance si prenante et pleine de chaleur de l’Archerie. Qu’ils viennent sans crainte de me déranger pour tous renseignements qu’ils désireraient posséder. Ils seront les bienvenus !
Composition actuelle du Bureau Capitaine honoraire
Denis LAFELIX.
Capitaine : Jean DEMAY.
Lieutenant : Jacques DEMAY. Sous-Lieutenant : Guy DEMAY. Procureur Marc BLONDEL. Trésorier Victor SZYMANSKI. Roy : Jacques DEMAY.

Source : Bulletin Municipal de Précy 1981

La bataille d’Azincourt

A Monseigneur,
le duc de Luxembourg,
Pair de France, Seigneur de Précy,
Monseigneur,
Les habitants de Précy, vos fidèles sujets, prennent la liberté de représenter à Votre Grandeur qu’ils ont obtenu de M. l’Abbé de Pomponne, Grand Maître et Juge Souverain du Noble Jeu de l’Arc, et des Confrères de Saint Sébastien, la permission d’establir dans votre paroisse de Précy le Noble Jeu de l’Arc et la Confrérie de Saint Sébastien et comme ils désirent d’establir un Jeu au bout du Pré de la Commune du dit Précy, vers Le Hâvre, de planter des arbres autour du dit Jeu, et d’avoir un Drapeau et une Caisse décorée des Armes du Jeu et de Vôtre Illustre Maison. Ils ont l’honneur de supplier très humblement Votre Grandeur d’avoir la bonté de leur en accorder la permission pour être le tout estably en présence de Vôtre Justice dudit Précy et ils redoubleront leurs Vœux au Ciel pour la santé et prospérité de Votre Grandeur.
Ont signé : Tassart, Bonnacord, Jacques Descourtieux, Legros, Le Fèvre, Destournelle, De Brébant, Deaubonne, etc…
Notre Procureur fiscal de Précy permettra ce qui est demandé par le présent placet en observant les formalités au cas requises. A Paris, ce 27 Février 1754, et sans que la plantation des arbres demandés puisse nuire ni préjudicier à nos droits.
Montmorency-Luxembourg.
Le Capitaine
de la Compagnie d’Arc de Précy.