Certains éléments concernant l’année 1793 à Précy jettent une lumière quelque peu ironique sur le Comité révolutionnaire de Précy. En effet, il semble bien que ce Comité de Surveillance de Précy a, plus que tout autre but, été créé pour protéger les intérêts de certains habitants de Précy. Sa composition le démontre clairement.
En 1792, le seigneur de Précy, Anne-Léon de Montmorency-Fosseux se réfugia en Belgique pour échapper aux massacres de la Terreur. De là il vendit la Seigneurerie, son château, ses fermes, ses terres et ses dépendances au Général François d’Avrange d’Haugéranville. Ce dernier était le beau-frère d’Alexandre Berthier et de César-Gabriel Berthier, tous deux membres du Comité de Surveillance de Précy, créé le 9 octobre 1793. César-Gabriel Berthier se fait alors appeler Berluy.
Le président de ce Comité s’appelait en réalité Pierre-Pascal Perache de Fanqueville. Il était l’époux – peut-être déjà veuf – d’Anne-Antoinette Berthier, et avait servi comme lieutenant dans la Compagnie des Gardes de la Poste du Roi dont François d’Haugéranville était le Major. César-Gabriel Berthier servait, lui aussi, avec le même grade dans cette Compagnie.
Mieux encore : le » citoyen de Kermont » qui commandait le peloton de la Garde Nationale, mise à la disposition du Comité de Surveillance de Précy, n’est autre que Jean-François d’ Avrange du Kermont, frère cadet du Comte d’Haugéranville. Celui-ci prit à la Restauration le titre de » Marquis de Précy » qu’il se vit reconnaître » par courtoisie » dans quelques courriers émanant notamment du Duc de Berry. Son fils cadet, Charles d’Avrange d’Haugéranville portait le titre de » Comte de Précy « . Sous-intendant militaire, il était né à Précy le 29 mai 1792 et mourut à Bourges le 16 décembre 1858. Il fut le dernier à porter un titre rappelant la possession de Précy dans la famille d’ Avrange d’Haugéranville.
A la lumière de ces quelques données on saisit mieux combien l’esprit révolutionnaire du Comité de Surveillance de Précy n’était qu’une façade même s’il se vantait d’avoir fait fondre les cloches, d’avoir donné de l’argenterie de l’église au Trésor National et d’avoir vendu les cercueils de plomb des Seigneurs de Précy pour acheter des munitions.
L’arrestation du Général d’Haugéranville le 30 octobre 1793, les démarches du Comité de Précy pour l’innocenter et sa prompte libération huit jours après, sont une preuve de plus de cette indépendance d’esprit des Précéens.
De même, les arrestations de l’époque ne sont pas dues à des rapports émanant du Comité de Précy, mais sont faites sur ordre de l’Armée révolutionnaire de Chantilly. Aussi n’est-ce pas étonnant que le Comité de Surveillance de Précy conteste ces arrestations sans autre forme de procès. Il réclame des justifications et obtient par ses remontrances la libération des intéressés.
Autre fait troublant qui va dans le même sens est celui du Duc d’Enghien (1772-1804). Ce petit-fils du Prince de Condé fut accueilli au château de Précy et s’y cacha un moment avant de partir à Ettenheim en Allemagne où il fut enlevé sur l’ordre de Napoléon Bonaparte, qui le fit fusiller le 21 mars 1804 dans les fossés du château de Vincennes.
(Selon les propos que j’ai recueillis de Philippe Martinet, descendant direct de François dAvrange d’Haugéranville).