Notre commune dispose d’une identité graphique qui confère un caractère officiel aux publications, aux courriers, traduite dans le blason ci-joint.
Il est tellement ancré dans nos mémoires que l’on ne s’interroge pas sur sa signification ou son histoire. Or, notre commune a la chance d’avoir plusieurs repères dans le temps qui donnent toute sa légitimité à ce symbole Précéen.
Avant de parler de son histoire, considérons tout d’abord sa composition.
Comme toutes les armoiries, les nôtres comprennent deux parties :
– La partie centrale, que l’on retrouve d’ailleurs sur les plaques de rues, est la plus ancienne. Elle est constituée par l’écu créé initialement sur lequel je vais revenir.
– Les ornements extérieurs, autour de l’écu.
- Les ornements extérieurs :
On peut identifier trois ornements distincts :
– Un château fort, en haut
– Deux branches d’arbres, à gauche et à droite,
– – Une médaille en-dessous
Le château fort et les deux branches d’arbres sont des ornements que l’on retrouve dans beaucoup d’armoiries de communes. On peut ainsi comparer le blason de Précy avec celui, historique, de Paris. Que de similitudes sur ces deux points. La plupart des villes ont hébergé en leur sein un fief féodal et donc des murs fortifiés. Les deux branches correspondent à du laurier et du chêne. Le laurier représente les victoires qu’aura connue chaque ville, et le chêne sa force au fil des siècles.
Pour Précy, ces symboles présentent cependant une légitimité propre :
On retrouve bien trace dans certains écrits d’un château fort à Précy : Enguerrand de Monstrelet en fait état dans ses chroniques, relatant la destruction de la « forteresse » de Pressy en 1430.
Le laurier et le chêne nous renvoient quant à eux à deux personnages liés à l’histoire de Précy :
– La branche de laurier peut ainsi faire référence à la branche qui ceignait la tête de Jules César. Celui-ci a combattu les bellovaques dans le secteur de Précy, et a donné son nom au « camp de César » qui domine l’Oise, du côté du Martray.
– La branche de chêne peut nous renvoyer au roi Saint Louis, représenté sous son chêne pour rendre la justice. St Louis qui est justement le nom de la paroisse de Précy, englobant également Boran et Blaincourt, mais aussi celui d’une des deux chapelles de l’église. Cette référence est due au don de terres que celui-ci a fait en 1228 pour permettre la construction de l’abbaye de Royaumont, dont le secteur était alors intégré à la même paroisse que Précy.
Il nous reste la médaille, suspendue aux deux branches. Quelle est-elle ?
Il s’agit de la croix de guerre 1939-1945, remise le 04/12/1949 à Précy sur Oise, comme elle le fut à d’autres communes ayant souffert de la seconde guerre mondiale.
En effet, Précy a subi plusieurs bombardements intensifs en 1944. Il y eu celui du 12/07/1944 qui a fait 3 victimes, de la famille PETENOT. Puis de nouveaux ont eu lieu le 05/08/1944, qui ont fait 13 victimes, dont le secrétaire de mairie et sa famille, une institutrice et sa famille, les parents de l’abbé FINOT, et bien d’autres. Cette liste s’ajoutait aux décès déjà connus en 1940 sur Précy. Mais cela ne semble pas suffire aux services de l’Etat qui, malgré le rapport au préfet adressé le 09/05/1947, faisant mention des 17 morts. Mais, le 28/01/1949, le conseil municipal, dirigé alors par Louis COEURDEROY, doit déplorer que Précy n’ait pas eu la médaille de guerre, contrairement à d’autres communes. Un nouveau courrier est alors adressé au sous-secrétaire d’état aux forces armées.
Enfin, la médaille est attribuée à Précy et la cérémonie de remise a lieu le 04/12/1949 à 10h30, en présence de M BIONDI sous-secrétaire d’état à la fonction publique, en présence également de M CUTTOLI préfet de l’Oise, et, bien sûr, de Louis COEURDEROY maire.
Nous pouvons à présent nous intéresser au cœur du blason, constitué par l’écu de notre village.
- L’écu de Précy :
- Les couleurs de l’écu :
La notion d’écu date du Moyen-Age, lorsque les chevaliers ont commencé à se revêtir d’armures et qu’ils durent imaginer une solution pour se reconnaître sur les champs de bataille, et notamment au moment des croisades. C’est ainsi que les boucliers ont été utilisés pour identifier et ont été appelés des « écus », portés par les écuyers.
Pierre Gambier, dans son indispensable « Précy en Isle de France » indique que le sire de Précy a participé à la 1ère croisade, à la fin du XIème siècle, « muni de son écu losangé de gueules et d’argent au chef d’or ». Il s’appuie pour cela sur un manuscrit en latin, datant de Philippe Auguste.
Cet écu est également représenté sur un sceau de Philippe de Précy de 1317.
On le retrouve au XVIIème siècle, dans l’ »Histoire de la Maison de France… », du père Anselme, référence en histoire et généalogie française. Il a ainsi décrit en page 408 le blason des enfants de Gilles de Saint Simon, Mery et Louis, seigneurs de Précy. Aux armes des De Rouvroy et des Haversquerque, avait été ajoutée « sur le tout lozangé d’argent de de gueules, au chef d’or ».
La présence de cet écu dans le chapitre consacré à la famille des ducs de Saint-Simon nous est expliquée par le plus célèbre d’entre eux, Louis de Rouvroy, duc de Saint-Simon, dans ses mémoires. Un des chapitres est consacré à la généalogie de sa famille et il mentionne ainsi en page 307 qu’une addition aux armoiries fut imposée à Gilles de St Simon par son cousin Louis, seigneur de Précy sur Oise. En effet, en 1451, lorsque celui-ci fait donation de ses terres à son cousin car il n’a pas de descendance, il impose de mettre au cœur les armes de Précy « losangé d’argent et de gueules, au chef d’or ».
L’histoire de la transmission de la seigneurie de Précy est relatée dans le livre de Pierre Gambier, tout comme elle est détaillée dans le recueil des écrits de l’abbé Speybroeck, disponible en mairie.
Enfin, s’il était encore besoin d’établir l’authenticité de cette description de l’écu de Précy, on le retrouve tout à fait officiellement dans l’ « Armorial de France », composé vers 1450 par Gilles Bouvier.
Toutes ces références, on ne peut plus sérieuses, permettent de vérifier l’exactitude des deux couleurs qui composent le losange : il s’agit bien de gris et de rouge. Rouge ? oui, car en héraldique, les couleurs sont en nombre restreint, et aux appellations spécifiques, classées en trois familles :
– – Les métaux : argent et or (gris et jaune)
– – Les émaux : azur, gueules, sable, sinople, pourpre (respectivement bleu, rouge, noir, vert et violet).
– – Les fourrures : vair et hermine (qui désignent des combinaisons de formes et de couleurs).
Il existe un nombre restreint pour les formes possibles pour un écu, comme pour sa partition (son découpage en plusieurs motifs), que l’on ne détaillera pas ici.
Mais il existe aussi une règle très ancienne sur l’utilisation des couleurs : celle de contrariété des couleurs. Celle-ci précise « pas de métal sur métal, ni émail sur émail ». Il n’est donc pas concevable dans un écu d’avoir un motif vert et violet, ou un autre gris et jaune.
De telles armes sont alors des « armes fausses », aussi appelées « armes à enquerre », ce qui a un caractère péjoratif pour les armoiries.
Ce n’est donc pas le cas pour notre écu, qui respecte cette règle, contrairement à une variante que l’on peut trouver parfois sur internet pour Précy. Il y a encore peu de temps, l’encyclopédie en ligne Wikipedia répertoriait ainsi pour Précy un écu « losangé d’azur et de gueules au chef d’or », avec la représentation ad hoc. Une telle arme était fausse, et a été corrigée depuis. Les trois couleurs du blason de Précy sont bel et bien argent et rouge, avec un chapeau en jaune.
Et, d’ailleurs, connaissez-vous le blason de Boran sur Oise : il est « Losangé de gueules et d’argent ; au chef d’or chargé d’un écusson de sable », souvenir d’une époque où Boran a fait partie de la seigneurie de Précy.
Pour conclure sur notre blason, qui a donc au moins un millénaire d’âge, qui l’a constitué sous sa forme actuelle ? Il s’agit de Pierre Gambier qui l’a peint et dont la représentation ci-jointe a été reprise par la mairie. Il y a juste les initiales de l’auteur (PG) qui ont disparu en passant du tableau au blason communal.
Le blason figure, à côté de quatre autres, sur la belle médaille de Précy, trop méconnue, créée en 1993. Mais la description de ces blasons liés à notre histoire est une autre histoire.
Références :
- Monstrelet, Enguerrand de, (ca 1390, 1453), « Chroniques », tome V, BNF
- Manuscrit Latin 9816 correspondant aux Tables des registres A, C et E de Philippe Auguste, remis aux Archives Nationales
- Inventaire des sceaux de la Collection Clairambault, page 7007 du volume 89, BNF
- Pierre de Guibours, dit le père Anselme de Sainte-Marie (1625, 1694), « Histoire généalogique et chronologique de la maison royale de France, des pairs, … », tome IV, BNF
- Saint-Simon, « Mémoires de Saint-Simon : nouvelle édition collationnée par A. De Boislisle », BNF
- Le Bouvier dit Berry, Gilles, « Armorial de France, Angleterre, Ecosse, Allemagne, Italie », BNF
- Abbé Carlos Speybroeck, « Précy au fil de l’eau », Mairie de Précy sur Oise